Frédérique Durand : enquête sur les trésors enfouis de Notre-Dame de Paris
Frédérique Durand : enquête sur les trésors enfouis de Notre-Dame de Paris
L'archéologue Frédérique Durand.
De nombreuses découvertes réalisées par les scientifiques dans leurs recherches suite à la fouille réalisée en 2022 à la croisée du transept de Notre-Dame de Paris a permis la mise au jour notamment de deux cercueils en plomb et des fragments du jubé médiéval de la cathédrale.
Découvertes
Des découvertes majeures qui permettent aux historiens et aux archéologues de reconstituer un pan méconnu de l’histoire de la cathédrale.
Sarcophages
Les archéologues de l’Inrap ont exhumé deux sarcophages en plomb à la croisée du transept de Notre-Dame de Paris. Relativement bien conservés, ceux-ci ont été acheminés au CHU de Toulouse, afin d’être ouverts, puis fouillés avant d’entreprendre une série d’analyses.
Frédérique Durand
Les échantillons de végétaux prélevés dans le cercueil sont analysés par Frédérique Durand. Sa spécialité, c'est l'archéobotanique ou la carpologie, c’est-à-dire l'étude des vestiges végétaux, que ce soit des plantes, des fleurs ou des bourgeons.
Sauge
Elle a découvert une quantité importante de sauge et d'hysope permettant de lutter contre les infections chroniques des voies respiratoires, d'où les soupçons d'une méningite tuberculeuse.
Cathédrale
En février 2022 était sur le point de débuter la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Après l’incendie qui se produisit en avril 2019, près de trois ans, furent nécessaires pour enlever les débris et consolider les murs de pierre et les voûtes du plafond endommagés.
L'un des sarcophages en plomb lors de la fouille de mars 2022.
Notre-Dame
Si Notre-Dame devait rouvrir en 2024, comme l’avait décrété le président de la République, il était urgent d’amorcer la reconstruction de ce qui avait été perdue lors de l’incendie, à commencer par l’emblématique flèche qui surmontait la cathédrale.
Archéologues
Cependant, il était tout d’abord obligatoire de faire appel aux archéologues. Selon la loi, en effet, tout projet de construction touchant à un sol au sein duquel seraient éventuellement enfouis des objets anciens, ou des vestiges, nécessite l’intervention d’archéologues territoriaux.
Christophe Besnier
À Notre-Dame, il était de leur devoir de s’assurer que rien de précieux ne serait pulvérisé par l’échafaudage de 770 tonnes nécessaire à la reconstruction de la flèche.
Fouilles
Christophe Besnier et son équipe de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) n’avaient, au départ, pas plus de cinq semaines pour mener des fouilles sous le sol en pierre de la croisée, lieu où le transept, les bras courts donnant à l’église une forme de croix, rencontre la nef et le chœur.
Objets
À Notre-Dame, lorsque l’on fouille assez profondément, il n’est pas rare de découvrir des objets historiques, le site fut occupé pendant plus d’un millénaire avant que la cathédrale n’y soit construite entre les 12e et 14e siècles.
Équipe
L’équipe de Christophe Besnier n’étant toutefois autorisée à creuser qu’à une quarantaine de centimètres sous le sol, soit la profondeur de la base de l’échafaudage, les attentes de l’archéologue étaient assez minces.
Surprise
Quelle ne fut pas sa surprise. « Les vestiges se sont révélés beaucoup plus riches que ce à quoi on s’attendait », révèle-t-il. Au total, son équipe découvrit 1 035 fragments de nombreuses œuvres d’art. « C’est très impressionnant. »
Didier Rykner
Les archéologues mirent au jour de superbes œuvres d’art qui se trouvaient à l’origine au centre de la cathédrale, que l’historien de l’art Didier Rykner décrivit comme étant « parmi les plus exceptionnelles de la sculpture mondiale, toutes époques confondues ».
Sculptures
Une trentaine de ces sculptures, perdues depuis des siècles, sont depuis peu exposées au musée de Cluny.
À la suite de l’incendie qui s’est produit en avril 2019, des archéologues ont été autorisés à mener des fouilles sous la cathédrale qui a été ravagée par les flammes. Nombre d’objets anciens retrouvés, perdus depuis des siècles,
Dalles
Dès que l’équipe de Christophe Besnier retira les dalles du sol, ainsi qu’une fine couche de terre et de décombres, la partie supérieure d’un sarcophage anthropomorphe en plomb apparut. À proximité, des sculptures en calcaire commencèrent également à sortir de terre.
Têtes
Des têtes et des torses grandeurs nature alignées avec soin sous le sol, le long de l’entrée du chœur. Christophe Besnier obtint alors l’autorisation de pratiquer des fouilles au-delà des quarante centimètres de profondeur afin de pouvoir extraire les objets anciens.
Plomb
Bien que l’équipe de construction fût dans l’attente, les cinq semaines de fouilles s’étendirent à plus de deux mois. Un autre sarcophage en plomb fit surface, ainsi que quelques autres sépultures moins fastueuses, ce qui n’était pas si surprenant étant donné le nombre de tombes parsemant toute la cathédrale.
Statues
Les statues s’avérèrent constituer la plus importante découverte. Les archéologues déterminèrent qu’il s’agissait de vestiges du jubé en calcaire datant du 13e siècle, cachant à l’origine le chœur et le sanctuaire de Notre-Dame de la vue du public.
Jubé
Détruit au début du 18e siècle, ce jubé de quatre mètres de haut avait pour l’essentiel disparu. Il n’en restait plus que quelques fragments et ne subsistait ni représentation complète aucune, ni la moindre trace de son sort.
Un morceau de bloc sculpté provenant du jubé, datant du 13e siècle et détruit au début du 18e siècle. Des parties de celui-ci ont été ensevelies sous la cathédrale.
Moyen Âge
Sa découverte nous rappelle aujourd’hui à quel point le fait de visiter Notre-Dame pouvait constituer une tout autre expérience au Moyen Âge, période à laquelle la cathédrale fut construite.
Chef-d’œuvre
Le jubé était un chef-d’œuvre de la sculpture gothique, dont les œuvres pouvaient être ornées de peinture. Parmi les sculptures grandeur nature que l’équipe de Christophe Besnier mit au jour se trouvait la tête et le buste d’un Christ sans vie, les yeux fermés, du sang rouge s’écoulant de la blessure causée par une lance au niveau de l’un de ses flancs.
Exceptionnelle
« La sculpture est vraiment exceptionnelle par sa finesse, son souci du détail », affirme Christophe Besnier. « La représentation des paupières, des oreilles, du nez... C’est incroyable. »
Portail
Aujourd’hui, lorsque l’on passe par le portail central de la façade de Notre-Dame, il nous est possible d’apercevoir l’autel moderne et le chœur situé au-delà. Néanmoins, au 14e siècle, période à laquelle Notre-Dame fut achevée, le jubé, surmonté d’un immense crucifix, faisait obstacle.
Mot
Le mot « jubé » provient du latin jubere, soit « ordonner », le premier mot de la formule consacrée « jube, domine, benedicere », ou « Daignez Seigneur nous bénir », à l’origine récitée depuis une tribune : le jubé en question.
Siècles
Le jubé resta en place pendant près de cinq siècles. Les pratiques liturgiques finirent par évoluer, de même que le style, le gothique passant de mode. Le clergé de Notre-Dame, traditionaliste, conserva son jubé plus longtemps que la plupart des églises du pays.
Incendie
Si l’incendie ne s’était pas produit, son équipe n’aurait jamais eu la chance de mettre au jour. Ne serait-ce que cette petite partie du jubé. Au bout du compte, les fouilles archéologiques ne ralentirent pas la progression de la restauration. La nouvelle flèche fut construite dans les délais prévus.
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